Le carnet du CFC

Le nouveau dépôt de machines de Clermont-Ferrand.
par M. Liquier, Ingénieur en Chef adjoint de la Traction. Septembre 1929.
Sources
: Bulletin PLM Septembre 1929.

Le dépôt de Clermont-Ferrand, qui va être démoli pour l'agrandissement de la gare et qui a été abandonné par la Traction Ie 1er mars 1929, était à cette date le plus ancien dépôt du Réseau : sa construction remonte à 1850.

Fig. 1. - L'ancienne rotonde.

Il comportait une rotonde de 48 mètres de diamètre (fig. I) abritant 16 voies rayonnantes desservies par une plaque tournante de 14 mètres de diamètre. Seules pouvaient y être remisées à couvert les machines de type ancien, trop faibles pour assurer le service des lignes à profils assez accidentés qui aboutissent à Clermont. Les machines puissantes des dépôts voisins, qui remorquaient la plupart des trains, et notamment les trains express, ne pouvaient être tournées qu'après avoir été désaccouplées de leurs tenders, et elles étaient remisées à découvert sur quelques voies situées entre les ateliers de wagons et les voies principales : Il en résultait de grosses difficultés dans l'exécution du service et des dépenses de personnel improductives par suite des manoeuvres compliquées de tournage, de classement et de ravitaillement des locomotives.

Fig. 2. et 3. - Plan du dépôt

D'autre part, ce dépôt ne disposait que d'un atelier absolument étriqué, à une seule fosse, accessible d'un seul côté et ne pouvant recevoir que des locomotives de faible puissance : son outillage était tout à fait rudimentaire. Enfin les installations à l'usage du personnel étaient désuètes et peu conformes aux règles modernes de confort et d'hygiène. Les difficultés que provoquait cette insuffisance manifeste du dépôt de Clermont avaient conduit la Compagnie à décider sa reconstruction dès 1912. Une reconstruction sur place étant impossible en raison des agrandissements à prévoir pour les installations de l'exploitation, la Compagnie avait acquis les terrains nécessaires pour créer de toutes pièces un nouveau dépôt au delà de la bifurcation des lignes de Saint-Germain des Fossés et de Montbrison, le long de cette dernière.

Pendant la guerre les travaux furent suspendus, mais, en 1925, lorsque nous avons introduit les machines Pacific sur notre ligne du Bourbonnais, il nous a fallu réaliser d'urgence sur ces terrains une première étape du nouveau dépôt en installant vingt voies rayonnantes de remisage autour d'un pont-plaque de 21 mètres. En même temps, le projet primitivement établi pour la construction d'un nouveau dépôt était revu et modifié en tenant compte des améliorations successives apportées depuis 1912 à nos établissements de traction. Les plans schématiques des figures 2 et 3, établis à la même échelle, permettent de comparer l'ancien et le nouveau dépôt. Celui-ci, établi dans la plaine des Gravanches, à un niveau inférieur à celui de notre ligne du Bourbonnais, est réuni à cette dernière par deux voies de circulation de machines qui prennent naissance au poste 1 de Clermont, c'est-à-dire à l'entrée même de la gare à voyageurs, afin d'assurer dans la plus large mesure l'indépendance de la circulation des trains et des mouvements de machines.

Fig. 4. - Vue d'ensemble du quai à combustibles.

En profitant de la différence de niveau dont il est question plus haut, on a pu établir le magasin à combustibles sur une plate-forme reliée aux voies de circulation des machines et située à 4,50 m au-dessus du niveau général du dépôt. Les wagons de combustibles amenés sur cette plate-forme à l'aide d'une machine de manœuvres sont déchargés dans des wagonnets Decauville, et ceux-ci sont ensuite déversés à l'aide de couloirs appropriés dans les tenders des locomotives. Cette disposition, que montre la figure 4, est, pour le moment, unique sur le Réseau ; elle présente l'avantage de supprimer l'emploi de grue ou de monte-charge et met ainsi le ravitaillement des machines à l'abri de toute interruption de fonctionnement de ces appareils élévatoires. Elle réduit aussi le roulage du combustible et demande un personnel moins nombreux, tout en étant susceptible de distribuer pratiquement 500 tonnes de combustible par jour, c'est-à-dire plus que ne consomme le dépôt de Périgny ou celui d'Avignon. Dans le voisinage de ce quai à combustible, nous allons prochainement installer trois monte-charges à scories.

Fig. 5. - Remise des machines.

Le nouveau dépôt comporte une remise annulaire (fig. 5) en ciment armé à auvent, de 115,50 m de diamètre extérieur, pouvant recevoir sur fosses 46 locomotives des types les plus modernes, à l'aide d'un pont-plaque de 21 mètres à commande électrique. Les locomotives y sont remisées, cheminée à la périphérie, en face de hauts et larges vitrages assurant un excellent éclairage diurne.

Un transbordeur circulaire électrique d'une tonne, nécessaire pour la manutention des pièces lourdes, dessert toutes les fosses et sur les piliers sont installées des prises d'air comprimé, pour les marteaux et perceuses pneumatiques portatifs nécessaires à l'entretien courant des machines.

Un parc de remisage desservi par un pont-plaque électrique de 24 mètres, pouvant recevoir, actuellement 30 locomotives, dont 12 sur fosses, et ultérieurement 46, lorsque les besoins l'exigeront, porte à 761 le nombre des machines susceptibles d'être remisées simultanément et réserve 16 places pour les besoins de l'avenir.

L'atelier d'élevage, d'une superficie de 1.620 m2, largement éclairé par de hauts vitrages, doté de prises d'air comprimé et de prises de courant, offre quatre fosses de 16 mètres de longueur pouvant recevoir les machines Pacific et les Mikado et desservies pour la manutention des pièces lourdes par deux ponts roulants transbordeurs électriques de 2 tonnes et, pour les opérations de levage, par six vérins électriques de 25 t et par une grue électrique de 24 t. L'outillage comprend un tour à roues, quatre tours, une fraiseuse, une machine à aléser, deux machines à percer, une machine à tarauder, une cisailleuse-poinçonneuse, une machine alternative à scier les métaux, deux étaux-limeurs, une machine à meuler double, un marteau-pilon pneumatique ; toutes ces machines-outils sont des types les plus modernes et desservies par un transbordeur roulant de 2 t. Les figures 6 et 7 donnent une vue extérieure et une vue intérieure de cet atelier.
En outre, un vérin hydraulique annexe de la remise, permet les visites périodiques ou accidentelles des boîtes à huile des machines et tenders.

 

Fig. 6. - Atelier de levage. Vue extérieure.

Fig. 7. - Atelier de levage. Vue intérieure.

Les installations à l'usage du personnel ont été groupées en dehors de la remise et de l'atelier dans deux bâtiments pourvus du chauffage central. L'un, destiné aux mécaniciens et chauffeurs de passage, met à leur disposition 27 chambrettes à deux lits confortables, un lavabo à huit cuvettes avec cabine de douches, un vaste réfectoire et des WC. Les vestiaires et lavabos sont installés au premier étage ; les vestiaires peuvent contenir 210 armoires métalliques et les lavabos comportent six cuvettes en terre émaillée blanche (fig. 8) et une cabine de douche.

Fig. 8. - Vestiaires-lavabos des mécaniciens et chauffeurs de passage. Vue intérieure du 1er étage.

Fig. 9. - Vestiaires-lavabos des agents de la résidence. Vue intérieure du rez-de-chaussée.

Le deuxième bâtiment, destiné aux agents de la résidence, est composé d'un rez-de-chaussée et d'un étage. Au rez-de-chaussée se trouve le vestiaire de ces agents, pouvant contenir 170 armoires métalliques et les lavabos. Ceux-ci renferment trois grands bacs munis chacun de 18 robinets donnant un mélange d'eau chaude et d'eau froide (fig. 9), ce qui permet à 54 agents de se laver simultanément sans se gêner.

L'étage comprend le réfectoire des agents sédentaires. Le sol de tous ces locaux est revêtu d'un carrelage en céramique non poreuse n'absorbant pas les graisses. Les parois intérieures et les cloisons sont recouvertes, jusqu'à 1,75 m du sol, de carreaux céramiques émaillés blancs, au-dessus, jusqu'au plafond et y compris le plafond lui-même, les murs sont peints au ripolin blanc. Ce mode de revêtement donne une grande clarté à l'ensemble et une très heureuse impression d'hygiène et de confort.

En outre, une salle de bains, à la disposition de tout le personnel de la Compagnie à Clermont, offre six cabines de bain et une cabine de douche.

Enfin il existe un bâtiment spécial au Service Médical, qui comprend, au rez-de-chaussée, une salle d'attente, un cabinet de consultations et une salle de pansement, traités de la même façon que les locaux destinés au personnel. A l'étage, on a aménagé un logement pour une infirmière professionnelle, chargée d'assister le médecin dans les consultations et de donner les premiers soins aux malades et aux blessés.

L'éclairage général du dépôt, et des voies de circulation de machines, abords des bureaux, de l'atelier et de la remise est assuré par projecteurs.

En somme, le nouveau dépôt de Clermont offre au visiteur un ensemble qui peut soutenir avantageusement la comparaison avec les plus récentes installations réalisées ailleurs.

Au point de vue technique, il est susceptible de faire face, dans les meilleures conditions économiques, non seulement au service qui lui incombe actuellement, mais encore au développement du trafic qu'on peut escompter dans cette région si riche de la France.

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