L'Association
La 030 T 19 O&K du CFC
Acquisition et premières
recherches
par François Borie
« 60 000 à droite ! »
Je lève la main et, me désignant, le commissaire priseur annonce « 65 000 ici à
gauche », puis « 70 000 à gauche en haut ». Je surenchéris et le
commissaire annonce « 75 000 à gauche en bas
80 000 en haut ». Sur le
coup, je me retourne, quel est donc cet importun ? Bon sang, mais cest lami
Marc qui, juché sur une pierre juste derrière moi vient de lancer deux enchères coup
sur coup. Bon, jarrête là, et le commissaire annonce « 80 000 une fois, qui
dit mieux, deux fois
adjugé à monsieur » il a peut-être dit cela
différemment, mais ça y revient et Marc emporte le lot n°19, « la Bouillote ».
Courte engueulade dans les rangs : depuis quinze jours que la vente était annoncée, Marc affirmait quil navait « plus un rond » et je ne pensais vraiment pas quil achèterait une loco, il aurait mieux fait de le dire, ce farceur, on aurait évité la surenchère !
Les lots se suivent, et je ny prête plus guère attention car cest le tour dun modèle réduit puis de 040 DFB, machines vraiment grosses pour notre réseau du CFC.
La O&K lot n°24 : elle penche, mais ce nest pas seulement parce que la voie est mal nivelée : elle penche vraiment ! Les parties rouillées sont dans lombre, sur la photo, on a limpression quil y a une lanterne, en réalité il nen reste que le squelette. A droite, la loco modèle réduit, lot n°20.La Bouillote est derrière la O&K.
Grâce aux efforts conjugués de Daniel, Jean-Pierre, Jean-Marie et Vinent, la machine est sortie de la seconde remise qui labritait
Mais hélas, pour atteindre la zone de chargement, il faut franchir la première remise et la cheminée ne passe pas, il va falloir la démonter. Le fonte est fragile et le démontage lui sera fatal. Aujourdhui encore, malgré les soins attentifs de Vincent, il na pas été possible de la réparer et notre loco est sans cheminée.
Le lot 24 nest pas bien affriolant : une 030 bien décatie dont on pouvait se demander, lors de la visite, si on ne risquait pas de passer la main à travers la chaudière tellement elle est rouillée. La carrosserie est à refaire et la lanterne nest plus quun vestige. Ce nest sans doute que parce quelle est à lentrée du dépôt quelle a été prise en photo pour faire la couverture de la plaquette de la vente. Mais Jean me glisse à loreille « Cest vraiment une machine intéressante », comme il connaît bien toutes ces machines, ayant compté parmi les relations de lancien propriétaire, jai tendance à ajouter foi à son affirmation. Emporté par leuphorie ambiante, un peu poussé par la déception de ne pas voir eu « la Bouillote » et certainement aussi parce que mon jugement était grandement faussé par la bouteille de « La cuvée du Tramway » dont nous avions arrosé notre casse croûte de midi, je me lance dans lenchère pour lemporter à 90 000 francs. Est-ce une bonne affaire ? Seul lavenir nous le dira.
Finalement, par rapport aux prix auxquels nous nous attendions, compte tenu de prix de ventes réalisés lors dautres transactions, nous ne nous en tirons pas si mal.
Freddy acquiert encore le locotracteur BB essence - électrique quil avait repéré puis la vente se tire doucement avec des accessoires et des bricoles car tout doit disparaître et le dimanche soir, 4 mars 2001, retour au bercail après une journée bien remplie.
Les deux semaines qui suivent voient alors se dérouler un marathon de force car il faut rapatrier tous nos achats sur Villeneuve. Léquipe des gros bras (grandes gueules et fortes têtes un peu aussi) du CFC entre en action et fait merveille car non contents de tout ramener à bon port, Vincent, Jean-Pierre, Daniel, Jean-Marie, Freddy et sans doute dautres que joublie ont également pris des photos, ainsi que William qui nous a fait un reportage sur le déchargement (jallais écrire « débarquement » tellement cette arrivée massive de machines puisque les deux locomotives de Jean sont arrivées dans les mêmes moments, a fait leffet pour certains dune invasion). Un très grand merci à tous ceux qui ont travaillé sans compter pour charger, transporter et ranger ces quatre locomotives, deux locotracteurs, deux aiguillages et même le locotracteur Jung de Denis.
Villeneuve-la-Garenne: les locos sont encore sur le camion | Le déchargement est assuré par Vincent, Freddy et Gilbert. Pour pouvoir mettre les deux machines sur le même plateau, il a été nécessaire de démonter les tampons sablières de Nemours de lO&K. On les conserve au cas où Ce petit démontage nest pas sans rappeler celui que Floris LEPERS raconte dans son livre sur la Bertha (voir LVdC n° 12), décidément, les camions sont toujours trop courts ou les ferrovipathes toujours trop exigeants. |
Maintenant, laventure commence, il va falloir remettre tout en état de marche, et pour la O&K, il va y avoir à faire sur plusieurs fronts car si son état nest pas fameux, son intérêt semble plutôt résider dans sa rareté, le catalogue de la vente nannonçait-il pas « machine rare en France » ? Il faut donc aussi essayer den savoir plus à son sujet en vue dun éventuel classement « Monument historique ». Pour lheure, jen suis donc aux recherches et plus je cherche plus je trouve cela intéressant.
C'est Marc-André qui "ouvre le feu" et lance les première recherches dont il me transmet les résultats par courriel. Dès le 12 mars, il a déjà des infos, voici ses deux premiers envois :
Salut mon Borinet
Quelques éléments que j'ai pu
réunir sur ta loco ( sous toute réserve pour le moment, mais c'est une piste) N°5729 de
1913 de 40 cv
Elle serait passée par le Parc de Bagatelle dans le Pas de Calais
Je vais vérifier si il n'y a pas eu deux machines comme celle là car à la vente ils
parlent de 1912 c'est ce qui me gêne
En revanche, elle n'existe pas sur mon catalogue O&K, je vais téléphoner à des copains pour savoir et puis au Leighton Buzzard, ils ont pas mal de O&K et des informations, j'en avait discuté avec eux lors de mon passge sur leur réseau.
On va avoir un travail de quête à
faire pour reconstituer l'histoire des machines Jean pourra surement nous aider
A samedi pour le champagne, Vincent organise le rapatriement
Je la retrouve (si c'est bien elle)
dans les carrières de Breuilpont Eure et Loir (A. GOUERY) où elle serait arrivée en
provenance de ? (origine Jacob Georges, Weimar)
Ella aurait quitté Breuilpont pour les Sablières de Nemours en sept 1950.
Je continue mes recherches, mais hélas je n'ai que 3 bouquins sur 5 et ce sont des bouquins britanniques qui ne sont plus réimprimés. Hélas, je n'ai pas le Nord de la France où il y le parc de Bagatelles mais comme Vincent était en relation avec eux pour le loco 0B0-11, il peut leur téléphoner pour savoir de quelle date à quelle date, elle est restée dans ce parc.
L'histoire n'est donc pas entièrement débrouillée et quelques zones d'ombre commencent à apparaître, on verra par la suite qu'il y en a d'autres. Pour l'instant, si le numéro de la machine est confirmé, nous avons bien une piste, mais la date de construction n'est pas certaine puisqu'il y a ambiguïté entre 1912 et 1913, en fait, aucune ne s'avèrera correcte.
Sur cette base, Marc rédige une notice pour le site et donne une explication pour le moins embrouillée au sujet du numéro; cette notice a été également publiée dans n° 51 davril 2001 :
Cette machine porterait le n°5729. Pour le moment, on n'a pas trouvé le numéro qui semble-t-il d'après l'IRS serait celui d'une 020T. Ce numéro a été donné à des membres de l'IRS lors de leur passage aux Sables de Nemours, mais vers 1995, ils se sont rendus compte de l'erreur.
J'attends avec impatience de pouvoir voir la machine pour vérifier ce numéro car à ce moment elle n'est pas encore rendue au CFC. Malheureusement, à son arrivée, il fallait se rendre à l'évidence : les gens de l'IRS avaient de bonnes raisons de se tromper sur le numéro car la plaque ovale manque sur la chaudière, elle s'en est probablement détachée il y a bien longtemps.
Jean a remis à Marc un abondant dossier sur la machine : devis et facture de travaux et tous les comptes-rendus de visite de l'APAVE effectués pendant son séjour au Parc de Bagatelle, et même la facture de sa vente à monsieur MERVAUX. Nous connaissons ainsi le numéro de la machine et la date de sa dernière épreuve : 1972. Que Jean soit ici remercié pour nous avoir procuré ces précieux documents qui seront bien utiles lors d'un éventuel re timbrage. Je reproduis ici le fac-similé des plus représentatifs. Jen retiens:
Nous arrivons à l'été 2001 et les choses vont en rester là jusqu'à la rentrée. Pourtant, certaines incohérences dans les informations me turlupinent : bien que nous ayons les papiers, pourquoi cette incertitude sur le numéro, pourquoi cette incertitude sur l'année de construction et puis 40 CV, ça ne me paraît pas beaucoup pour une machine de cette taille : c'est la puissance de la Bertha, pourtant sensiblement plus petite. Quant à Marc, il ne m'aide plus beaucoup depuis qu'il m'a asséné coup sur coup que le Leighton Buzzard navait pu lui fournir aucun autre renseignement et qu'il ne trouvait pas ce modèle dans le catalogue O&K.
Alors, il y a encore beaucoup à chercher et quelques surprises que je vous raconterai dans un prochain numéro de .