Le carnet du CFC

Les trois trains de La Londe les Maures (Var)

Freddy Genot

De retour à La Londe (Var) où je passe les vacances d’été avec mes petits enfants, j’ai sorti les vélos du garage et comme chaque année, regonflé tous les pneus. Dès lors, il n’était plus question de retarder la descente vers la plage par le sentier des Annamites. Ce dernier a été établi sur la plate-forme d’un ancien chemin de fer et baptisé ainsi en souvenir des populations qui participèrent à sa construction. 
Mon attention fut attirée par de nouveaux panneaux posés le long du chemin. Ils racontent un peu le passé industriel d’une petite ville qui vit maintenant de la vigne et du tourisme. Il y eut pour commencer une exploitation minière et ensuite une usine de torpilles. Ces deux industries établirent leur voie de chemin de fer. Encouragé par les éléments visibles sur les panneaux, j’ai essayé de retrouver la trace des lignes industrielles.

Le train des mines 
Vers 1875, le nouveau propriétaire du domaine des Bormettes redécouvre un filon de plomb argentifère sur son domaine, et crée, quelques années plus tard, une société pour l’exploitation des mines de l’Argentière. À partir de 1890, d’autres filons découverts au nord de la commune sont exploités. C’est encore en 1890 que la ligne de chemin de fer à voie étroite Hyères—Fréjus est inaugurée. Une voie ferrée est établie entre les puits d’extraction, les ateliers de traitement, l’embarcadère de l’Argentière et la ligne Hyères—Fréjus. L’opposition des villageois retarda la construction du tronçon le plus important entre les lieux d’extraction du nord de la commune, l’usine de traitement et l’embarcadère jusqu’en 1899.
Les rails et le train, composé d’une locomotive de type Decauville, de wagonnets et d’une baladeuse furent achetés à l’exposition de 1889. 
Les filons sont rapidement épuisés et l’exploitation des mines commence à décliner dès 1904. Elle cessera définitivement en 1929.

L’usine des torpilles.
C’est en 1907 que la société Schneider s’installe aux Bormettes. Dans un premier temps, son activité se limite à des essais de lancement de torpilles, fabriquées dans les usines de Harfleur et du Creusot depuis un îlot artificiel construit en 1908. Suite à d’importantes commandes, une véritable usine sera implantée aux Bormettes. En 1920, la société Schneider construit une voie métrique reliée à celle du littoral. La société fut expropriée en 1937 et le site repris par la défense nationale qui le ferma en 1993. 

Quelques Vestiges


La voie de 60 passait sous la voie du littoral, dont on aperçoit la gare, et sous le boulevard Azan pour aller vers le nord de la commune. On distingue la rambarde en tube inutile puisque le passage sous la route est remblayé. Je n’ai retrouvé aucune trace de la voie au nord de ce pont. 


Les Londais ont la nostalgie du train. Il est toujours présent, tout au moins à la gare.


La ligne Schneider passait sur un pont au-dessus de la voie Decauville Voie de. 60, 
coté village,        coté usine.


Le tracé de la voie de 60 est toujours visible dans la pinède de même que des culées de passage sur les ruisseaux.


Et pour terminer, le pont de la voie Schneider sur le Maravenne avec les restes d’un signal.

Références :

  • D’Hyères à aujourd’hui. Images de La Londe par Anne Cantelle

  • La Londe les Maures, Mines, torpilles et espionnage par Christophe Naigeon

  • Office du tourisme, La Londe.

Tous clichés, F. Genot

 

NdlR

Le chemin de fer de la Société Anonyme des Mines des Bormettes (plomb) eut son tracé définitif en 1895 après une hésitation sur la construction d'une voie entre la mine et la gare terminus des Salins d'Hyères, située à seulement 5 km (ouverture en 1899). 
La voie ferrée établie à l'écartement de 60 cm était constituée de rails de 14 kg au mètre et le rayon des courbes en ligne ne descendait pas en dessous de 75 m. Elle desservait l'ensemble des installations (ponton, mine, lavoir, cité ouvrière et l'ancienne fonderie, ainsi que les différents hangars). Un court embranchement à l'Ouest aboutissait au ponton de l'Aiguade, proche de l'établissement militaire desservi par la ligne Schneider (VM).
À partir du triangle qui donnait accès à le fonderie (1897), la voie suivait la VM de la ligne Scheider vers le village de La Londe, passait sous le voies du Sud France et suivait l'ancien chemin intercommunication n°8 (actuel D88) et la rive droite du Pansard au-delà du Pas-du Cerf jusqu'à la mine de la Rieille. Un peu avant le lieu-dit le Camp-Long, un embranchement en rebroussement ouvert en 1900 se dirigeait vers l'Ouest en direction de la mine du Verger et se terminait par un Z.
En comptant l'ensemble des embranchements miniers, le réseau de la compagnie s'étendait sur environ 15 Km.
Le matériel issu essentiellement de l'exposition Universelle de 1889 était constitué de quatre locomotives Decauville : deux 021T de 7,5 t, une 031T (type Royan semblable à celle de Pithiviers) de 10 t et une 020T de 5 tonnes (voir catalogue Decauville).
L'exploitant avait également récupéré les baladeuses type KE de l'Exposition Universelle. Ces baladeuses avaient une longueur de 9, 30 m pour une largeur de 2,10 m et une capacité de 56 voyageurs. Leur poids était de 3,2 tonnes. Le directeur de la mine circulait dans la voiture salon de l'Exposition, voiture qui a transporté plusieurs souverains. Le minerai, quant à lui, était transporté dans des wagons type "girafe" avec caisse en bois. Dans les mines des berlines de 800 kg de charge utile amenaient le minerai au jour.
L'extraction fut abandonnée aux Bormettes avant la guerre de 14 et seule la mine du Verger survécut jusqu'en 1921. Fermeture définitive en 1929 et dépose de la voie en 1935.

  

Situation géographique des lignes. 
En 2002 une randonnée organisée par l'office du tourisme permettait aux promeneurs d'aller jusqu'à la mine de la Rieille avec un accompagnateur à partir de Camp-Long, là où la voie quitte la route D88 pour
pénétrer dans le massif des Maures.
La fonderie des Bormettes.
L'usine Schneider vu du ponton. Noter, à droite, la voie de 60 installée sur le ponton pour le transfert des marchandises.
Une autre vue du ponton avec la double voie. Au fond, les bureaux de l'usine Schneider.

Il existe des cartes postales plus intéressantes, mais leur rareté les rend difficiles à posséder.
L'une montre la rame de baladeuses Decauville KE à la station des Bormettes et l'autre la 031T Decauville "Fernande" rachetée aux Tramways de Royan.

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