Le carnet du CFC

Du stumpfwaldbahn touristique au "waldbahn" fonctionnel

Symon" de Meudon

Merci pour le lien avec le nouveau numéro du bulletin de l'association (des Chanteraines)! Il est clair que les rencontres avec les autres réseaux favorisent les échanges et l'observation des possibilités d'innovation du "système Decauville".
Ceci montre aussi qu'avec de telles facultés d'adaptation, le Decauville peut retrouver sa vocation initiale, actuellement perdue de vue, pour sortir le matériau bois (holz, stamm, pour les grumes) des forêts (wald) par les petites voies ferrées mobiles (bahn) avec le chemin de fer forestier (Waldbahn), en renfort ou alternative des matériels lourds modernes actuellement connus au point d'ignorer ou de mépriser les performances du chemin de fer Decauville.
Par rapport à la tempête du 24 janvier 2009 dans le massif forestier Aquitain, M Bo Malmborg du Orkaggen railway en Suède a démontré la capacité du Waldbahn à évacuer les bois abattus par des tempêtes en 2 épisodes : 2005 et 2007. Il a efficacement réactualisé le matériel et le système présenté par le lien Orkaggen railway. On y retrouve les grands principes pratiques et pragmatiques des promoteurs des années 1880. Le lien "Orkaggen railway" donne accès, par la rubrique "news", à la description des deux chantiers de collecte des bois abattus par les deux tempêtes. Il est également utilisé pour la "gestion durable" régulière du massif forestier de cette propriété. Cela devrait demeurer la vocation normale du Stumpfwaldbahn et des autres réseaux forestiers. Contrairement au Stumpfwaldbahn, ce n'est pas un "conservatoire", certes indispensable pour maintenir le matériel ou susciter l'émulation, c'est encore un chemin de fer de sylviculture, adapté au concept scandinave "petite échelle forestière" (small scale forestry) pour conserver l'élasticité du sol nutritif et sa capacité à nourrir les semis naturels et tout l'écosystème forestier préservé.

Quel est l'atout actuel du Decauville ?
Les engins forestiers lourds ont un taux de chargement faible, de 0,8 à 1, entre le poids mort et le poids de la charge utile. Le Decauville forestier a un taux de charge de 3 à 5. Un wagonnet de 400kg porte 2 tonnes et un couple grumier 2*2 : 4 tonnes. Pour 1,6 tonnes de poids vide, formant 3 couples grumiers, la capacité est de 12 tonnes, ce qui correspond à un engin "porteur" "forwarder" de 14 tonnes de métal à vide, pour 26 tonnes de poids total roulant !. La charge par essieu du wagonnet est de 1,2 tonne roulant sur des traverses dont la superficie conseillée est de 2400 cm2 à 3600 cm2, (130*24cm) pour que la pression sous la traverse demeure limitée à 0,35bars. En cas de système de chenilles (tracks) adaptées à l'engin, d'une largeur de 600 mm à 700 mm (donc de 60cm à 70cm !), la pression  du porteur ne respectera le sol que pour une capacité de 5t, c'est-à-dire inférieure à la demi-charge
utile ! En outre, un institut scandinave constate que le déroulement des chenilles consomme 30% d'énergie de plus que sur pneumatiques. Or sur le rail, le simplex de M Malmborg a une puissance de 10 hp, contre 150 sur chenilles.
Un guide technique suscite l'utilisation d'un câble téléphérique de 200 à 400m pour les mêmes fonctions, en donnant accès à 400 tonnes (1t/m3 et 1m3 par mètre linéaire), pour des chariots monorails suspendus d'une capacité maximale de 4 à 5tonnes à l'élingue. De plus, pour tracter le chariot dans les deux sens, un cable de traction "yo-yo" complète le câble porteur. De ce fait, le cloisonnement est surplombé par deux ou trois longueurs de câble. Le dispositif doit être en outre tendu et sécurisé par des contre-forts, des haubans, comme pour une caténaire.
Si le câble monorail reste intéressant pour des pentes forestières de plus de 25%,  si quelques tests de démonstration avaient démontré l'intérêt de l'usage en plaine du câble, le "bi-rail" Decauville a fait ses preuves sur le sol en pente jusqu'à 25% avec un treuil et jusqu'à 8% en traction directe par traction animale ou mécanique, également jusqu'à 4 tonnes.
Les tourbières irlandaises et allemandes démontrent que la pose-dépose et transferts des 400 à 500m de voies mobiles peuvent être efficacement mécanisés dans les meilleures conditions par rapport au travail "aérien" des cablistes. Les tourbières modernes et un des rares chemins de fer forestiers modernisés de Hongrie montrent qu'une grue chenillée ou un tracteur agro-forestier basse pression peuvent effectuer toutes les manutentions et "décharger" la voie ferrée du poids d'une grue mobile. Dès lors, en respectant les contraintes physiques de respect de la porosité du sol forestier, on peut éviter les frais du reboisement intégral et aléatoire. La tourbe est un matériau quasi fossile dont la production est très lente par rapport à certains feuillus ou résineux qui produisent du bois en purifiant l'air et l'eau avec un rendement de 9 à 19 m3/ha et par an. Ainsi, par rapport à une tourbière, en 10 ans, l'accroissement naturel permet de récolter 90 à 190 tonnes de bois frais sur un carré de 100m/100m.
Les chemins de fer de collecte de canne à sucre d'Australie montrent qu'une faible charge par essieu des wagonnets individuels n'empêche pas de les rassembler en longs convois : 100 "bins" d'une capacité individuelle de 3t, 300t. C'est donc la remarquable "élasticité" du chemin de fer Decauville qui est méprisée en forêt, alors qu'elle demeure connue des producteurs de tourbe horticole ou énergétique et de canne à sucre, autre biomasse renouvelable.
Les organigrammes les plus récents de description de systèmes d'exploitation forestière, qui décrivent la suite des actions du martelage du bois sur pied à son évacuation vers un parc à grumes, font apparaître que le bûcheronnage manuel et le bûcheronnage mécanisé peuvent bénéficier du soutien logistique des gammes appropriées de matériels Decauville : au bûcheronnage manuel peut être associé le Decauville léger comme celui de vos associations, au bûcheronnage mécanisé peut être associé un Decauville mécanisé renforcé, relevant soit d'une version civile actualisée du matériel militaire Péchot-Brigade 1888-1918, soit du matériel industriel actuel des tunneliers et des chemins de fer de collecte de tourbe ou de canne à sucre.
En outre, le Decauville lourd peut aussi être l'outil de "correspondance"  des câbles avec un déchargement sur wagon pour éviter un encombrement rapide des places de réception et de protection des voiries concernées par ces flux.
Visiblement, les deux "écoles" théoriques subsistent entre les partisans des voies posées traverses par traverses et rail par rail et ceux des voies pré-montées, le nouveau chemin de fer agricole springfield ayant opté en voie fixe pour la première méthode. Originalité : il utilise un locotracteur à accumulateurs en espace rural, donc 0 émission de GES sur ossature bois, le fin du fin du Decauville écologique.
Contrairement à ce qui est régulièrement soutenu, les constructeurs de matériels roulant et de voie n'ont pas disparu mais se sont adaptés à leurs nouveaux marchés, en neuf ou réemploi modernisé. A l'ère de la mondialisation et des conteneurs, livrer de 4t à 16t de voies mobiles en kits conteneurisés n'est pas irréaliste. De plus, le cadre métallique du conteneur peut comporter un dispositif de manutention permettant de poser le conteneur sur wagonnets et livrer directement le matériel à pied d'œuvre.
En outre, entre le matériel forestier officiel et le matériel monté par les réseaux associatifs pour résoudre des problèmes d'entretien, il existe aussi une possibilité d'innovation méconnue de ceux qui définissent les systèmes, tels que la "ferroviarisation" de certains
matériels récents pour rendre moins pénible l'activité de bûcheronnage assistée par le Decauville rénové. Je suis ainsi surpris, que, malgré le côté très débrouillard des Roumains du chemin de fer de Viseu de Sus ou autre réseau de train secondaire, le camion porteur à portique basculant des bennes Marrel n'ai pas encore été "ferroviarisé" alors que ce portique permet la manutention de caisses ou pièces de 4,5 m de long et de x tonnes. Deux porteurs Marrel dont un sans cabine peuvent réaliser des travaux ferroviaires considérables. On ne voit plus que par le bras hydraulique unique central inférieur qui ne peut apporter cette assistance "souple". Le portique Marrel me semble permettre de poser des panneaux de 4,5 5m de voie lourde préfabriquée, mais aussi une bonne longueur de panneaux de 100 et 160 kg, dans la limite d'encombrement et de stabilité du plateau, avec une action arrière et non pas latérale comme pour les grues hydrauliques situées derrière la cabine.
C'est donc dans le cadre de vos associations qu'une ou des équipes de bûcheronnage pourraient re maîtriser la pratique de l'accès à 150-400 m de cloisonnement avec les voies mobiles.
Il était estimé, avant la tempête, un besoin de 300 câbles de 400 m pour mobiliser du bois. Il y a donc une part de ce parc qui peut être convertie en antennes mobiles Decauville, pour usage en plaine ou faibles reliefs. 
Il pourrait y avoir un partenariat avec les réseaux d'Oléron et du Cap-Ferret pour former les équipes à l'usage du Decauville.

Principe de manutention de grume .

Note

  • Dans son site Orkaggen railway M Malmborg indique la "recette" pour créer un Decauville forestier dans un chapitre "the Track". Voir aussi la rubrique "News" dans laquelle de nombreuses photos de cette mise en oeuvre donne bien l'idée actualisée d'un chemin forestier.

  • Voir à ce sujet la manutention des grumes en 5 pouces exposé à Sinsheim

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